Saint-Marcel 18 juin 1940, d’Yves Mervin

Après une carrière dans l’industrie navale de défense, Yves Mervin s’adonne depuis plus de vingt ans à sa passion pour l’Histoire. Il a publié au printemps dernier Saint-Marcel 18 juin 1944, enquête sur un désastre. Cette parution poursuit le sillon d’une analyse méthodique de la Résistance en Bretagne qu’il s’attache à expliciter tout en en éclaircissant certaines zones d’ombres.

Son précédent ouvrage, Joli mois de mai 1944 : la face cachée de la résistanceen Bretagne, paru en 2013 (au terme de six années d’investigation) avait ouvert la voie, après un premier récit, Arthur et David – Bretons et Juifs sous l’Occupation, publié en 2011.

Fils de résistant, la vocation littéraire de l’auteur résulte d’une intention première, celle de recueillir et transcrire les souvenirs de son père. Au fil des échanges comme de l’exploration minutieuse des faits, il s’imprègne de cette page d’histoire dont le souvenir est encore vivace. Dans son dernier opus, il s’attache à décrire l’histoire du maquis de Saint-Marcel, dans le Morbihan. Pour mémoire, ce dernier s’est constitué un an et demi avant la date fatidique du 18 juin 1944 qu’évoque l’ouvrage d’Yves Mervin. Il résulte de l’initiative d’Emile Guimard, de Lizio, en vue de réceptionner des parachutages d’armes afin d’harceler les Allemands dans la débâcle occasionnée par le débarquement de Normandie. Le lieu discret propice à cette opération — situé derrière la ferme de la Nouette, près de Saint Marcel — avait été identifié préalablement par le lieutenant Guy Lenfant avec la mission Cockle dès la fin 1942.

Le 5 juin 1944, le chef départemental des FFI, Paul Chenailler — connu sous le pseudonyme de colonel Morice — entreprit de réunir les résistants du Morbihan sur le terrain de la ferme précitée. À cette même date, plusieurs combattants des Forces Françaises Libres furent parachutés à une quinzaine de kilomètres, près de Plumelec et de Guéhenno, dans le cadre de l’opération Dingson. Le maquis fut attaqué le 18 juin 1944 par les Allemands. En dépit de leur résistance et de l’intervention d’avions de chasse américains venus mitrailler les convois allemands, les 3000 résistants furent contraints de se replier en profitant de la nuit.

De façon méticuleuse, Yves Mervin a rassemblé une impressionnante documentation. Il s’est également plongé dans des archives inédites, ouvertes depuis peu à la consultation. À la lumière de ces précisions, il resitue les combats de Saint-Marcel dans le contexte plus global du débarquement de Normandie puis de la libération de la Bretagne. Se démarquant des interprétations idéologiques où politiques, il se fonde avant tout sur l’analyse minutieuse de l’opération considérée sous son angle militaire.

L’ouvrage, précis et documenté, comprend 7 chapitres précédé d’un avant-propos. Il est accompagné d’abondantes annexes — utiles et précises — qui fournissent au lecteur de précieuses indications et témoignent de la rigueur de son approche. L’avant-propos inscrit résolument le livre dans la continuité de Joli mois de mai, son précédent ouvrage. L’auteur y rappelle les travaux menés par Roger Leroux, auteur en 1991 de Le Morbihan en guerre 1939-1945, bien que ce dernier n’ait bénéficié de l’éclairage des sources élargies aujourd’hui disponibles. Il entend surtout contextualiser le combat de Saint Marcel pour le resituer dans un cadre plus large.

Les trois premiers chapitres (« D’une guerre mondiale à l’autre », « Le second front », « Overlord ») permettent au lecteur de s’imprégner de l’époque et de se remémorer la complexité de la situation. Les trois chapitres suivants (« Jour J + 12 », « La traque » et « Percée et poursuite ») démontent de façon méticuleuse les opérations militaires avec un grand souci de précision. Le dernier chapitre enfin, intitulé « Amnistie », évoque le regard rétrospectif porté sur les évènements, à la lumière des témoignages de personnes impliquées.

De cet ouvrage, il convient de souligner la rigueur de la démarche que ce soit dans l’énonciation des faits et des dates, les témoignages apportés, l’aspect factuel et sans affect de l’évocation des choses. À le lire, l’on ne peut manquer d’être frappé par la qualité de l’investigation menée et de la documentation amassée. Revenons une seconde, avant de conclure, sur la documentation qui parachève l’ouvrage. Les annexes sont assorties de précisions complémentaires, de cartographies voire d’éléments chiffrés. L’index détaillé permet de s’y retrouver dans l’abondance des noms ou des événements. La bibliographie judicieuse fait état de la littérature consacrée au sujet. Le recensement alphabétique des abréviations et des sigles évoqués dans les pages, de même que le recensement des illustrations, complètent les aides utiles apportées au lecteur.

Note : Yves Mervin a par ailleurs ouvert en juillet 2013 le blog « Devoir de mémoire en Bretagne » ( https://devoirdememoireenbretagne.wordpress.com/) proposant au lecteur de nombreux articles en lien avec ses sujets d’intérêt.

Saint-Marcel 18 juin 1944, Yves Mervin
Editeur : Yori Embanner, 71 Hent Mespiolet, 29170 Fouesnant
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